Suisse

Entretien Maurice Clerc (FIBL Lausanne) 05/10/09 :

Innovations :
- Création d'une "bourse biologique en ligne"
- Des outils de conseil réactifs


Le FIBL (Forschungsinstitut Für Biologischen Landbau), créé en 1978, est un institut de recherche et de vulgarisation d’informations en Agriculture Biologique présent en Suisse, en Autriche et en Allemagne. Il a pour rôle d’aider les conseillers et les agriculteurs impliqués dans ce type d’agriculture, que ce soit en production végétale ou animale.

Cet institut est financé à 30% par la confédération suisse, à 50% par des fonds privés (fondations, acheteurs, distributeurs) et le reste par les collectivités et des programmes européens.

En Suisse Romande, qui comprend environ 500 agriculteurs bio, le FIBL s’investit tout particulièrement dans le développement des grandes cultures puisque 70% de la consommation des céréales bio est importée. Ce pourcentage est encore plus important en ce qui concerne les oléagineux et protéagineux (97 %).

Maurice Clerc a travaillé pendant 8 ans à bioinspecta (organisme de contrôle et de certification). Il est actuellement membre d’une équipe de conseil au FIBL et pilote l’antenne romande à Lausanne. Il constate une certaine stagnation de l’Agriculture Biologique en Suisse pour des raisons autres qu’économique (comme en témoignent les aides à la conversion proposées par certains cantons, qui ne sont pas toujours utilisées par les agriculteurs):

-   Temps de travail : charges de travail plus importantes (entretien des champs,…), pouvant entrainer la gestion de main-d’œuvre supplémentaire (moins d’indépendance, contrainte pour l’agriculteur)

-    Période de conversion : 2 ans pour des cultures annuelles sans aides à la conversion (sauf dans certains cantons suisses).

-   Culturels : refus de salissement des parcelles par des adventices (absence totale de mauvaises herbes). « Les agriculteurs suisses veulent voir leurs champs aussi propres que leur baignoire » (Maurice Clerc).

-    Réglementation : Le cahier des charges de l’ordonnance bio (défini par la confédération Suisse) est en constante évolution, ce qui peut poser des problèmes d’adaptation. Selon Maurice Clerc, il serait nécessaire de plus faire appel à la responsabilité et à l’autocontrôle des agriculteurs pour diminuer certaines contraintes réglementaires.

Aussi, l’institut de recherche élabore différents outils pour encourager la conversion au bio et répondre aux besoins des agriculteurs en terme de conseil.

-   Les fiches techniques : réalisées en collaboration avec AGRIDEA (organisme de formation des conseillers agricoles financé par la confédération Suisse). Ces fiches synthétiques concernent toutes les productions (animales et végétales) et sont mises à jour annuellement. Chaque agriculteur travaillant avec le FIBL peut disposer d’un classeur répertoriant l’ensemble de ces fiches.

 

-    2 sites internet (www.fibl.org et www.bioactualité.ch) : le premier s’adresse d’avantage aux chercheurs et aux organisations professionnelles, le second aux praticiens et aux agriculteurs. Ces sites internet sont actualisés et visités régulièrement par les personnes concernées. Il s’agit là d’un outil de travail très intéressant et très réactif pour les structures d’encadrement, qui peuvent diffuser rapidement de nombreuses informations à l’ensemble des acteurs de la filière (actualités, mais aussi avertissements agricoles…). La version allemande du site bioactualités.ch est très utilisée, puisqu’elle est fréquentée 4000 fois par semaine. Par ailleurs, l’équipe du FIBL a créé un service gratuit de « bourse biologique » sur le site. Celui-ci permet aux agriculteurs de mettre la liste des produits qu’ils recherchent ou qu’ils vendent en ligne et favorise ainsi les échanges entre les producteurs. Ce système fonctionne très bien pour les ventes et achats de fourrages (foin,…).

 

-    Des formations : destinées aux agriculteurs sur des thèmes spécifiques avec des démonstrations au champ. 

 

-    Des expérimentations pratiques : celles-ci sont mises en œuvre depuis quelques années et concernent des essais pratiques en bandes dont on connait sensiblement les résultats (les essais scientifiques ont déjà été réalisés). Ces travaux concernent essentiellement le développement des cultures associées (orge/pois) pour la valorisation des légumineuses et des techniques culturales simplifiées du sol visant à améliorer le bilan écologique du bio (réduction de la consommation du diesel, abandon de la charrue). L’intérêt de ces essais concerne également la publication des résultats « en temps réel ». Des expérimentations similaires en arboriculture, ainsi que sur la prévention de ravageurs sur certaines cultures sont également réalisées.


 

 Bureau du FIBL (Lausanne) en compagnie de Maurice Clerc



Entretien de Michel Chaubert (agriculteur bio à Puidoux) 06/10/09 :

 

Innovations :
- Séchage en grange avec récupérateur de chaleur
- Valorisation de la biodiversité élevée de ses prairies


Michel est agriculteur depuis 30 ans à Puidoux. Il a 32 vaches laitières (Montbéliardes et Brunes suisses). La production moyenne est de 7500kg/an de lait bio (!!!) Michel travaille avec 1 employé et son père. L’exploitation est certifiée Bourgeon (label bio de Biosuisse) depuis une quinzaine d’années. Ici, la terre est lourde, il est difficile d’intensifier. L’Agriculture Biologique reste donc une bonne solution. De plus, les subventions de la confédération suisse pour les surfaces en AB sont intéressantes.

Le lait biologique est ramassé par les « laiteries réunies de Genève ». En Suisse romande, les producteurs de lait bio sont peu touchés par la crise laitière. En effet, ils se situent sur les zones de plusieurs fromages AOC (Mont d’Or, Fribourgeois, Raclette, Gruyère, Emmental,…) et font donc l’objet d’une forte demande. Ce n’est pas le cas du lait bio produit en Suisse allemande, beaucoup plus sensible à la crise. Michel souhaite, avec 3 producteurs bio, transformer leur lait en gruyère. Cette activité fait « peur » aux laiteries réunies de Genève, qui verraient alors une quantité importante du lait bio romand, être transformé hors de leurs circuits.

Suite à la visite de la ferme, nous souhaitons mettre en avant deux innovations qui nous paraissent intéressantes :


Michel possède un système de séchage du foin en grange, avec récupérateur solaire : 700 m² de toit sont doublés avec des récupérateurs solaires. Des gros ventilateurs aspirent l’air, qui  s’engouffre dans la doublure du toit. Il est ainsi chauffé et soufflé par-dessus les stocks de foin disposés sur des claies. L’air chaud remonte à travers le foin, et ressort chargé en humidité. Ce système permet de sécher 1600m3 de fourrages, séparés en 3 compartiments (1ère coupe, luzerne, regain). Grâce à ce système, il ne mouille quasiment jamais son foin, il est ramassé très rapidement. Il obtient ainsi un foin de très bonne qualité lui permettant d’atteindre un niveau de production élevé tout en limitant l’apport de concentrés.


En Suisse, pour avoir droit aux paiements directs, chaque exploitation doit avoir entre 3 et 7% de « surfaces de compensation écologique », c'est-à-dire des surfaces qui respectent l’environnement (pâturages extensifs, bandes enherbées à haute qualité environnementale, arbres fruitiers haute-tige,…). Le cahier des charges de biosuisse (95% des producteurs bio) exige d’en avoir au minimum 7%. L’exploitation de Michel Chaubert compte 17% de surfaces de compensation écologique. Ce sont majoritairement des prairies extensives, sur lesquelles le fauchage doit avoir lieu après le 15 juin, et aucun pâturage ne doit se faire avant le 1er septembre. Ces pratiques reviennent à faire ce qui se pratiquait il y a 100 ans. Les vignerons des côteaux de Vaud venaient faire les foins après le travail dans les vignes, au mois de juillet. Les prairies retrouvent ainsi une bonne qualité environnementale. Par ailleurs, ceci permet d’avoir des fourrages de très bonne qualité et des subventions de la confédération.
Michel Chaubert fait partie d’un « réseau écologique ». Il s’agit d’un groupement de producteurs, créé pour développer leurs surfaces de compensation écologique grâce à de l’entraide, et des conseillers extérieurs.
Le contexte agricole régional est favorable à la production biologique, et au développement de ces surfaces de compensation écologique. Selon l’agriculteur, « il est inutile de s’acharner à produire pour inonder un marché saturé. On produit de la nourriture en quantité largement suffisante chez nous, alors on peut se permettre de produire une image ». D’autant plus que la confédération suisse subventionne ces pratiques. Pour les producteurs, cela représente également une certaine fierté et une satisfaction d’entretenir des prairies avec de jolies fleurs et des papillons.


 

 Exploitation agricole de Michel Chaubert

 

 

Entretien avec Bertrand Bollag (Agriculteur Bio à Diegten et conseiller agricole bio), le 07/10 :

Innovations :

Adaptation de son exploitation agricole au contexte socio-économique.

Conseil aux agriculteurs bio vers des productions innovantes répondant à des marchés de niche.


Bertrand Bollag est un exploitant agricole biologique sur la commune de Diegten. Il est également conseiller agricole bio à la « chambre d’agriculture » sur le canton de Basel-Land. Après une formation agricole, il s’est installé dans les années 70 sur une exploitation de 18Ha. Par conviction, il a immédiatement choisi d’adopter le mode de production biologique. Il a débuté par du maraichage et l’élevage de vaches laitières, qui lui permettait de produire du fromage blanc et du lait fermenté. Six à sept personnes travaillaient alors sur l’exploitation. A cette époque, suite aux différents mouvements alternatifs, il existait un réel engouement pour la vie rurale.

Bertand Bollag a arrêté successivement la production maraichère puis la production laitière pour se reconvertir dans l’élevage de bovins allaitants. Ceci lui a permis de s’investir dans un organisme professionnel agricole en tant que conseiller. Après une dizaine d’années d’élevage allaitant, un troisième changement de production est en train de se réaliser : l’élevage équin. L’objectif est d’élever et de dresser les chevaux pour l’équitation tout en proposant une pension pour les animaux. Cette nouvelle activité lui permet de réduire progressivement le cheptel bovin, dont la filière est fortement touchée par la baisse du prix de la viande. La proximité avec Bâle et l’autoroute, lui permettent d’être proche d’une forte demande pour l’équitation. Par ailleurs, deux personnes compétentes s’occupent du dressage et des cours d’équitation.

 

La deuxième activité de Bertrand Bollag est le conseil aux agriculteurs biologiques. La manière avec laquelle il oriente ses recommandations est innovante : il cherche une production adaptée à l’exploitation, répondant à la demande d’un marché de niche. Cette méthode permet de garantir la commercialisation des produits issus de l’exploitation, et par conséquent assure sa viabilité économique. Les fermes biologiques suisses sont souvent petites et situées dans des zones montagneuses. Ces petites exploitations sont plus à même de se positionner sur des marchés de niche (magasins spécialisés, haut-de-gamme, circuits courts) puisque les rapports de force avec la grande distribution sont trop déséquilibrés aux dépens des producteurs. A titre d’exemple, un agriculteur  a développé la production de mozzarella en élevant des bufflonnes, un autre encore produit des œufs de poules verts.

Bertrand est le seul conseiller bio du canton de Bale-Land. Il est donc sollicité sur une grande diversité de productions, dont il n’a pas forcement la maitrise. Il doit donc faire appel au réseau, FIBL par exemple, pour obtenir les informations nécessaires et répondre aux attentes des agriculteurs. Son expérience dans le domaine de l’agriculture biologique lui permet d’avoir un réseau de connaissances important.



Bertrand Bollag se sent plus à l’aise en travaillant sur une petite exploitation, celle-ci nécessitant des investissements plus limités. Dans un contexte où l’on nourrit le mythe des grandes fermes industrielles, l’exploitation de cet agriculteur témoigne de la viabilité de petites fermes, grâce à leur souplesse et leur réactivité, face aux évolutions du marché. 

  

 Exploitation agricole de Bertrand Bollag.

 

Entretien avec Céline Géneau et Elodie Belz (doctorantes), le 09/10 à Frick

 

Le centre de recherche en agriculture biologique que ne nous avons visité à Frick, est le siège du Fibl de la Suisse : 125 personnes y travaillent actuellement. Le Fibl a débuté près de Bâle. L’agriculture biologique se développant, les locaux sont devenus trop étroits pour accueillir l’ensemble de ses activités. C’est pourquoi, il a déménagé en 1997 dans un ancien lycée agricole à Frick. En outre, ce centre de recherche existe aujourd’hui en Allemagne et en Autriche. Le Fibl de Frick dispose de parcelles agricoles et d’élevages qui lui permettent de réaliser des essais expérimentaux : il possède un domaine viticole avec ses propres chais (vinification), de vergers et d’une exploitation agricole avec une boutique et un restaurant qui sont exploités selon les règles de l’agriculture biologique. Mais le FIBL ne se limite pas au centre de Frick : de nombreux travaux sont réalisés chez des exploitants bio. Comme l’annonce Martin Ott, président du conseil de la fondation du Fibl suisse « nous travaillons main dans la main avec près de 300 exploitations afin de répondre au mieux aux problématiques de l’agriculture biologique » (Rapport d’activité du Fibl, 2008). L’objectif du Fibl est de créer un réseau autour de l’agriculture biologique qui regroupe les sphères de la pratique, du conseil, de la formation et de la recherche.

Le Fibl développe également des programmes internationaux. Il propose des formations agricoles dans les pays de l’Est et en Amérique latine. Il possède également des programmes de recherche en Inde, au Kenya et en Bolivie. L’objectif est d’évaluer le potentiel de l’agriculture biologique dans trois zones climatiques différentes. Le Fibl est particulièrement reconnu à l’étranger grâce à son programme DOK où il compare l’agriculture biodynamique, biologique et conventionnelle sur le long terme.

 

Voici quelques essais qu’il mène actuellement :

 

-          Des vaches cornues en stabulation libre

 

Souvent, les vaches sont écornées pour éviter les risques de blessure. Cependant, les cornes contribuent à maintenir la structure sociale dans un troupeau. C’est pourquoi, le Fibl mène des études pour connaître les aménagements et les pratiques nécessaires pour éviter les blessures chez les vaches non écornées.

 

-          L’intégration de personnes handicapées

 

Des recherches sont faites pour intégrer progressivement les personnes handicapées dans le secteur agricole et déterminer ce que l’agriculture peut offrir en matière d’engagement social. Ce programme est développé en Allemagne.

 

-          L’efficacité des systèmes de culture

 

Ce programme teste différents systèmes de cultures en évaluant notamment la diversité des communautés microbiennes du sol et leur fonction dans la formation et la minéralisation de substances organiques.

 

-          L’autorégulation des vergers

 

Cet essai, ici en verger de pommiers plantés depuis trois ans, regroupe un ensemble de pratiques alternatives et complémentaires qui permettent de supprimer totalement les intrants (produits phytosanitaires et fertilisants, même organiques). Ceci passe par des variétés résistantes (topas et ariwa) plantées en rangs alternés, un enherbement permanent en « système sandwich » avec piloselle (plante qui concurrence les adventices), des haies composites avec des espèces choisies pour attirer les auxiliaires de culture, des nichoirs pour les oiseaux et des terriers pour les renards afin de détruire les campagnols qui ravagent les vergers.

 

De nombreux travaux sont menés pour développer la lutte biologique. Une facette très innovante de ce concept est la lutte biologique par conservation. Elodie Belz et Celine Géneau (deux françaises), que nous avons rencontrées au Fibl, ont décidé de consacrer leur thèse à ce sujet.

La lutte biologique par conservation consiste à créer un environnement favorable aux auxiliaires de cultures endémiques (parasitoïdes et prédateurs des ravageurs de la culture), pour les attirer et les maintenir sur la parcelle afin de protéger la culture. Cette lutte biologique se différencie des lâchers d’insectes auxiliaires, qui peuvent être nuisibles d’un point de vue écologique en se trouvant dans un milieu sans prédateur et donc proliférer démesurément. Au contraire, ils peuvent disparaître rapidement du milieu et donc nécessiter une introduction fréquente et onéreuse.

Céline et Elodie travaillent sur la culture du chou : elles testent la capacité de différentes espèces de fleurs à attirer des auxiliaires de culture (parasitoïdes), pour lutter contre des ravageurs du chou (chenilles). Elles travaillent sur deux types de chenilles (Plutella xylostella (teigne du chou) et Mamestra brassicae (noctuelle)), c’est pourquoi, elles étudient deux parasitoïdes propres à chacune d’elle (Diadegma semiclausum et Microplitis mediator).

Ces deux jeunes chercheuses sont complémentaires dans leur travail. Elles étudient la capacité des parasitoïdes à réguler les populations de ravageurs et à se développer dans le système de culture. Elles analysent également le comportement des insectes qui varie par exemple, selon ses préférences olfactives ou visuelles (couleurs). Elles réalisent des expérimentations en laboratoire mais également en plein champs sur des parcelles d’agriculteurs. Nous avons pu en approfondir certaines lors de notre entretien :

 

-          Pour connaître la fleur la plus attirante pour le parasitoïde, plusieurs espèces sont plantées en même temps que les choux et au milieu des rangs (bleuet, lotus, etc…). La présence de cette fleur doit créer un milieu favorable au développement du parasitoïde en le nourrissant de son nectar. Sur ces parcelles expérimentales, le nombre d’auxiliaires est évalué pour chaque espèce de fleur. Il faut également tenir compte de la persistance de la plante pour que l’auxiliaire protège suffisamment longtemps le chou.

 

-          En laboratoire, on utilise un olfactomètre qui est un tube en verre en « Y ». Il permet d’étudier la préférence du parasitoïde pour telle ou telle fleur. A l’extrémité de chaque branche de « Y » on peut placer une fleur différente. Le parasitoïde privilégiera l’une des deux branches.

 

Il reste encore deux années pour Céline et Elodie afin de mener leur projet, celui-ci aboutira à d’autres questions et peut être à d’autres recherches.

 

Par cette rencontre, nous avons pu comprendre que la biodiversité fonctionnelle peut apporter un bénéfice direct aux agriculteurs lorsqu’elle est habilement mise à profit. Ces mesures doivent être techniquement et économiquement applicables. La recherche fondamentale et appliquée permettra d’élaborer une stratégie pour favoriser la biodiversité dans les différentes cultures. On peut tout de même se poser la question suivante : ces techniques de lutte biologique seront-elles suffisantes pour se substituer aux insecticides ou devront-elles être complémentaires aux traitements réalisés ?


 


 


Rencontre avec Céline Géneau (en haut) et Elodie Belz (en bas)


Entretien avec Dominique Levite (responsable département viticulture au FIBL), le 09/10 à Frick :

Innovations :

- Développement de cépages résistants aux maladies fongiques

- Recherche d’alternatives aux sulfites pour la conservation du vin

 

La viticulture bio en Suisse a fortement augmenté dans les années 90. Depuis, le taux de conversion stagne. 3% des surfaces viticoles suisses sont cultivées en agriculture biologique, soit 300 Ha. L’un des facteurs limitants est la production intégrée, toujours très présente. Selon lui, celle-ci est un leurre, les pratiques de la production intégrée lui semblent dangereuses.

Au Fibl, ils testent des cépages résistants aux maladies fongiques comme le mildiou (Uncinula necator, ou l’oïdium (Plasmopara viticola). L’objectif de la sélection variétale est d’obtenir des cépages aux qualités gustatives proches des variétés européennes, tout en y intégrant les gènes de résistances. Ceux-ci proviennent de variétés américaines, peu appréciées des consommateurs. « Ces variétés américaines sont faciles à produire, mais difficiles à boire » selon Dominique Levite. Si les qualités gustatives des variétés hybrides obtenues ne sont pas toujours appréciées, cela vient aussi du fait qu’elles n’ont jamais été cultivées sur des terroirs réputés. La culture de variétés résistantes est innovante, peu de viticulteurs les exploitent, ce que regrette Dominique. Il estime qu’elles sont incontournables en agriculture biologique. Elles permettent de réduire considérablement l’utilisation de produits phytosanitaires (à base de cuivre et de soufre en AB).

Le Fibl ne s’arrête pas au développement de cette seule pratique innovante. Il étudie également entre autres :

-          Travail du sol et enherbement : cela concerne les outils de travail mécanique, mais aussi « l’enherbement choisi » Par exemple, la piloselle que l’on plante au pied des vignes, produit une substance aux actions herbicides, régulant les chénopodes et amaranthes, herbes concurrentielles des vignes. L’enherbement sur le rang entre en compétition avec la vigne lorsque cette dernière s’installe. Cela oblige les racines à se développer en profondeur, et lui offre ainsi une meilleure résistance au stress hydrique. Elle sera d’autant plus performante pour s’alimenter en eau et en nutriments en profondeur.

-          Thème vin et santé : si l’on parvient à produire un vin sans pesticides et avec très peu de soufre, c’est alors un vin « médecin ». En effet, on y retrouve des composés phénoliques particulièrement bénéfiques à notre santé ; ils réduiraient les accidents cardio-vasculaires. De plus, ils engendreraient une transformation du mauvais cholestérol en bon cholestérol.

-          Vinification : les innovations proposées en vinification reposent entre autres sur la recherche d’alternatives à l’utilisation des sulfites. Les sulfites ont un rôle d’antioxydant et antiseptique. Ils permettent ainsi une bonne conservation du vin. Cependant ils sont nocifs pour la santé. La réglementation biologique impose une réduction de 30% de la concentration réglementaire en sulfites contenus dans le vin. Bien qu’ils ne puissent être supprimés complètement, puisqu’ils sont des produits issus de la fermentation du vin, il existe plusieurs alternatives. Ce sont par exemple les lysozymes (extraits des œufs), ou l’acide ascorbique qu’il est nécessaire d’associer à des tanins. . Mais ils peuvent avoir une influence sur les caractéristiques gustatives du vin. Aujourd’hui ces conservateurs ne sont pas aussi efficaces que les sulfites en termes de conservation. C’est pourquoi le Fibl mène des recherches sur ces composés.


 

Rencontre avec Dominique Levite.

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